Le 14 janvier 2020, je suis intervenu dans la ville du Mans pour la Journée d’étude « Amateurs et professionnels dans les sciences : définition et redéfinition des identités et des frontières (années 1850 – années 1950) ». Le programme peut être trouvé ici : https://ams.hypotheses. org/679
A noter que Florent Sérina interviendra au sujet de Robert Desoille.Vidéo de mon intervention
https://umotion.univ-lemans.fr/video/5127-renaud-evrard-de-quelques-amateurs-de-psychologie-et-de-sciences-psychiques-fondation-et-breve-existence-de-linstitut-general-psychologique-1899-1937/?is_iframe=true&size=240
Titre et résumé de mon intervention :
« De quelques amateurs de psychologie et de sciences psychiques : fondation et brève existence de l’Institut général psychologique (1899-1937) »
La naissance de la psychologie en France au tournant du XXe siècle est marquée par l'intérêt populaire et scientifique pour le "merveilleux psychique" (Plas, 2000). Dans ce cadre, quelques étapes-clefs semblent avoir impliqués des chercheurs "amateurs", conscients de faire excursion hors de leurs champs de compétence originels, ou désignés comme tels rétrospectivement. Ainsi, le botaniste et médecin Timothée Puel fonda en 1874 la première Revue de psychologie expérimentale au monde, en tentant vainement de fédérer d'autres amateurs des "sciences psychiques" (Evrard & Pratte, 2017). Le physiologiste Charles Richet se situa également à l'intersection de l'hypnose, de la psychologie générale et des sciences psychiques (Evrard, Gumpper, Beauvais, Alvarado, sous presse), trois domaines où ses contributions furent parfois pionnières, tout en étant qualifié rétrospectivement d'"amateur doué" en matière de psychologie (Carroy, 1993), à côté de "professionnels" tels que Janet et Binet (Plas, 2000). Sous l'impulsion de l'ophtalmologue Xavier Dariex, Richet accepta de fonder les Annales des sciences psychiques en 1891 (Alvarado & Evrard, 2012), revue construite de façon à transcender les spécialisations disciplinaires et à démocratiser ce domaine (Lachapelle, 2011), conviant chacun à témoigner de phénomènes merveilleux. Richet poursuivit son entreprise d’institutionnalisation de ce courant qu’il décrivait comme « l’avenir de la psychologie ». Le point d’orgue fut la création, en 1900, de l'Institut général psychologique, une institution de la psychologie en marge de l'académie et dans laquelle se posa de façon régulière la question de l'amateurisme, dans le même temps que se rigidifiaient les frontières de la psychologie (Brower, 2010). Dans ce contexte, les questions d'expertise et d'amateurisme semblent partie prenante des débats, avec un travail de démarcation prolongée jusque dans celui des historiens de la psychologie. Les démarcations alors établies ne portaient pas seulement sur le degré d'acceptation de la psychologie dans la communauté scientifique, mais également à différents niveaux intradisciplinaires : entre la psychologie et la "parapsychologie" ; entre la parapsychologie et différents courants voisins (spiritisme, occultisme, théosophie, illusionnisme) ; et entre les parapsychologues "académiques" et les "amateurs". Cet institut connaîtra plusieurs divisions successives tout en maintenant une activité originale jusque dans les années 1930, où ses finances furent finalement détournées vers la recherche microbiologique.